Tribune

« La prévention reste une clé de voûte de la lutte contre l’obésité et les comorbidités associées »

Par
Laurence Peyraut
Directrice Générale de Leem

La santé ne se résume pas aux soins. Au contraire. Être en bonne santé, c’est aussi ne pas avoir besoin de soins. Pourtant, notre pays n’est pas le plus à la pointe sur le sujet de la prévention. Jusqu’alors, seulement 2 % des dépenses de santé y étaient consacrées. Heureusement, une dynamique semble s’accélérer tant au niveau des acteurs publics et institutionnels que des acteurs économiques. Les ministères de la Santé, de l’Économie et de la Recherche ont présenté en août 2024, avec l’Agence de l’innovation en santé, la stratégie « innovation en prévention » du plan « innovation santé 2030 » qui sera dotée de 170 millions d’euros (M€). Un investissement nécessaire tant la prévention est au cœur des préoccupations des Français.

En tant qu’entreprises du médicament dont l’ADN est de soigner, nous militons en faveur d’une approche globale de la santé incluant une démarche préventive forte. Et derrière ce discours, il y a aussi des actes. Nous nous mobilisons en particulier sur trois leviers fondamentaux : la vaccination, l’action sur les modes de vie et le bon usage du médicament.

Vaccins : des boucliers invisibles

Depuis des décennies, les vaccins développés par l’industrie pharmaceutique ont prouvé leur efficacité en matière de prévention. Entre 2001 et 2020, ils ont permis d’éviter environ 20 millions de décès, 500 millions de cas de maladie (méningites, hépatites…) et 9 millions de cas d’invalidité de longue durée dans le monde1.Pour prendre l’exemple du VIH, grâce aux thérapies efficaces développées ces vingt dernières années, le nombre de décès dus au sida a été réduit de plus de moitié. Mais les efforts de s’arrêtent évidemment pas là. Les laboratoires sont à pied d’oeuvre sur le champ de la prévention, notamment en recherchant activement un vaccin contre le VIH. L’espoir est que ces recherches aboutissent bientôt à un vaccin qui pourrait changer la donne dans la lutte contre cette maladie. La recherche et le développement de nouveaux vaccins ainsi que le soutien aux campagnes de vaccination sont depuis longtemps et restent des priorités pour l’industrie pharmaceutique.

Agir sur les modes de vie, un enjeu majeur

Nous le savons, les facteurs liés à nos modes de vie (exercice physique, alimentation, consommation de tabac ou d’alcool…) permettent de retarder, voire d’éviter, l’apparition de nombreuses maladies, notamment chroniques. C’est pourquoi nos entreprises mettent en place, souvent en collaboration avec des associations de patients, de nombreuses actions de sensibilisation et d’éducation auprès du grand public et de leurs salariés.

L’obésité est un exemple frappant des défis que nous devons relever. Ce fléau touche aujourd’hui plus de 17 % des adultes en France2 et continue de progresser. S’il s’agit bien sûr d’une pathologie chronique complexe avec des réponses thérapeutiques à apporter, la prévention reste une clé de voûte de la lutte contre l’obésité et les comorbidités associées. Une perte de poids durable de plus de 10 % du poids total améliore un grand nombre des complications associées à l’obésité (diabète de type 2, hypertension, stéatose hépatique, maladies cardiovasculaires…), ainsi que la qualité de vie. Nos entreprises du médicament cherchent sans cesse des traitements pour lutter contre l’obésité, mais veillent aussi à sensibiliser la population à l’importance du mode de vie. Plusieurs laboratoires ont développé des programmes éducatifs pour informer les jeunes sur l’importance d’une alimentation équilibrée et d’une activité physique régulière.

Le bon usage des médicaments

Enfin, nous menons un combat particulier en faveur du bon usage des médicaments. On estime que le mauvais usage des médicaments serait à l’origine de plus de 200 000 hospitalisations et d’une dizaine de milliers de décès prématurés par an en France3. Nous avons lancé en juin dernier un plan d’actions de sensibilisation et d’accompagnement des professionnels de santé, mais aussi une campagne de communication grand public, qui se concentrent sur la polymédication des personnes âgées. Les seniors souffrent souvent de plusieurs pathologies et consomment plusieurs médicaments quotidiennement. Or, on sait qu’au-delà de cinq molécules prises simultanément, le risque d’interactions médicamenteuses augmente considérablement. Ce n’est que le début d’une longue bataille. D’autres campagnes sont prévues, notamment pour lutter contre le gaspillage des médicaments et la prévention de l’antibiorésistance.

Une urgence nationale

La prévention ne doit plus être le parent pauvre de la santé publique, et nous sommes en bonne voie. Chaque euro investi dans la prévention en économise bien plus dans les soins curatifs à long terme. Une étude récente montre que les programmes de vaccination pour adultes ont des bénéfices économiques jusqu’à 19 fois supérieurs à leur investissement initial4. Les vaccins contre la COVID-19 ont sauvé au moins 1,4 million de vies en Europe5.

Pour remporter le pari de la prévention, une mobilisation de l’ensemble des acteurs est nécessaire. Nous sommes prêts à jouer pleinement notre rôle. Nous nous engageons non seulement à développer des traitements innovants, mais également à promouvoir une culture de la prévention à tous les niveaux de la société. Au fond, il ne s’agit pas seulement de soigner des maladies, mais bien de soigner l’avenir.

Sources :
1. Sachiko Ozawa et al., « Estimated economic impact of vaccinations in 73 low- and middle-income countries, 2001–2020 », Bull World Health Organ, 27 juin 2017.
2. Annick Fontbonne et al., Rapport « Prevalence of Overweight and Obesity in France: The 2020 Obepi-Roche Study by the “Ligue Contre l’Obésité” », MDPI, 25 janvier 2023.
3. Leem, Dossier de presse « Bon usage du médicament », 4 juin 2024.
4. Hania El Banhawi et al., « Socio-Economic Value of Adult Immunisation Programmes », OHE, 18 avril 2024.
5. Dr. Hans Henri P. Kluge, « Déclaration – Les vaccins contre la COVID-19 ont sauvé au moins 1,4 million de vies dans la Région européenne », Organisation Mondiale de la Santé, 16 janvier 2024.