INTERVIEW
L’indexation sur l’inflation des pensions de retraite inférieures à 2000 euros brut est également une bonne nouvelle pour les assurés agricoles, d’autant que la très grande majorité de nos ressortissants sont concernés

François-Emmanuel Blanc

DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE

La MSA a exprimé un avis favorable au PLFSS 2020, celui-ci tente de répondre à la crise sociale que nous traversons à travers des mesures d’urgence, ces dernières sont-elles adaptées aux problématiques de vos adhérents ? 

La MSA a donné un avis favorable au PLFSS 2020, car elle considère que le projet de loi, a su trouver un équilibre, forcement délicat, entre les objectifs de maîtrise de la dépense publique et des mesures fortes visant à répondre à l’urgence sociale, notamment dans les domaines de la famille, de la retraite et de la dépendance. 

Le nouveau dispositif d’intermédiation des pensions alimentaires confié à l’ARIPA (agence de recouvrement des impayés de pensions alimentaires), constitue ainsi une grande avancée pour les bénéficiaires. Ce dispositif va permettre de verser les pensions plus rapidement. La MSA est actuellement mobilisée aux côtés de la CNAF pour que le nouveau système soit opérationnel au 1er juin 2020. 

L’indexation sur l’inflation des pensions de retraite inférieures à 2000 euros brut est également une bonne nouvelle pour les assurés agricoles, d’autant que la très grande majorité de nos ressortissants sont concernés. 

Le PLFSS pour 2020 contient par ailleurs plusieurs évolutions souhaitées par la MSA et ses adhérents. On peut citer principalement :

L’amélioration du niveau des pensions d’invalidité des exploitants agricoles et des membres de leur famille participants (conjoints collaborateurs et aidants familiaux). Même si le montant des pensions ainsi revalorisées demeure inférieur à celui des autres travailleurs indépendants, cela constitue une avancée majeure pour le monde agricole.

La création d’une indemnisation du congé de proche aidant pour les salariés et les travailleurs indépendants. Nous regrettons toutefois sa durée limitée (3 mois pour l’ensemble de la carrière).

Actuellement, le système de santé apparaît comme étant à bout de souffle. Pensez-vous que le texte permette d’initier une réelle transformation de ce dernier, notamment dans les territoires ruraux ? 

Le plan d’urgence pour l’hôpital voté par le Parlement était absolument nécessaire et répond aux besoins de l’ensemble des assurés, qu’ils relèvent du régime général ou du régime agricole. 

Pour ce qui concerne plus spécifiquement les territoires ruraux, le PLFSS contient par ailleurs deux mesures qui vont dans le bon sens, s’agissant des futurs hôpitaux de proximité et de l’aide à l’installation des jeunes médecins. 

Le financement des hôpitaux de proximité tiendra compte de l’offre de soins au sein d’un territoire à travers la création de la dotation de responsabilité territoriale. Elle permettra ainsi aux hôpitaux de proximité d’indemniser les médecins libéraux qui y exercent, pour des temps « non cliniques », afin de favoriser l’exercice mixte en ville et en hôpital de proximité. 

Des mesures visent également à simplifier l’installation des jeunes médecins. Elles prévoient le regroupement des quatre dispositifs actuels en un contrat unique appelé « contrat début d’exercice » (CDE) et la prise en charge, pendant deux ans, de la totalité des cotisations sociales dues par un médecin libéral. Il est également prévu l’amélioration du dispositif simplifié de déclaration et de paiement des cotisations et contributions sociales.

Même si ces mesures constituent de réelles avancées, il faut toutefois rester lucide : ce n’est pas un seul projet de loi qui peut transformer le système. Il y participe, comme le moyen qu’il est, mais ce sont les acteurs du système qui engageront le changement. 

C’est pour cette raison que la MSA s’est résolument engagée dans l’appui aux professionnels de santé dans les territoires ruraux pour la création des structures d’exercices coordonnées et de communautés professionnelles de territoires de santé (CPTS). 

Les mesures dites de non-compensation ouvrent un débat récurrent sur la question de l’autonomie de la Sécurité sociale, pensez-vous que celles-ci répondent à une situation exceptionnelle ou un mouvement de fond visant à uniformiser les budgets ? 

La non-compensation par l’État des dispositifs d’exonération de cotisations sociales correspond à mon sens à une situation exceptionnelle qui ne saurait remettre en question les équilibres budgétaires des lois de finances et de financement de la Sécurité sociale. Je suis, pour ma part, très attaché au principe de solidarité nationale qui se traduit notamment par les mécanismes de compensation et à la distinction entre l’équilibre du budget de l’État et celui de la Sécurité sociale. Cette distinction participe à l’autonomie de la Sécurité sociale et à la définition d’orientations adéquates des politiques publiques en la matière.

Pour la MSA, la préservation de l’autonomie de la Sécurité sociale ne se réduit pas toutefois aux questions financières. Le principal enjeu est celui de la gouvernance des organismes de Sécurité sociale et en premier lieu de la place des Partenaires sociaux. Le fait que les conseils d’administration des caisses de MSA soient composés d’élus, représentant à la fois les salariés, les employeurs et les exploitants agricoles, est à cet égard fondamental. 

La préservation du guichet unique de la MSA, qui recouvre l’ensemble des branches de la Sécurité sociale, est également une des conditions du maintien de l’autonomie de notre institution. C’est pourquoi nous sommes particulièrement attentifs, dans le cadre de la réforme des retraites, à ce que la MSA reste bien opérateur des retraites de ses ressortissants, tant au niveau local que national.