Par Jean-Paul Ségade
Président du CRAPS
À l’heure où la question de l’équilibre des comptes sociaux est au cœur du débat public, il est utile de rappeler qu’un déficit permanent ne constitue pas une politique viable sur le long terme. Si l’État a permis de préserver le tissu économique et social durant la crise sanitaire, les conséquences du « quoi qu’il en coûte » ne doivent pas occulter la nécessité de repenser notre système. L’efficacité, l’efficience et la pertinence doivent être les remparts face aux préoccupations comptables qui apparaîtront très vite après la crise. Il s’agira alors de concilier soutenabilité budgétaire, soutenabilité économique et soutenabilité sociale, comme de penser en termes d’investissement et non de dépenses.
La question de l’équilibre budgétaire n’est pas nouvelle et recouvre plusieurs dimensions. Historique, d’abord, puisque dès le XVIIIe siècle la question des revenus de l’État et de leur équilibre était posée. Juridique ensuite, puisque le vote de comptes à l’équilibre dans les collectivités territoriales, au niveau de l’État ou encore des régimes sociaux, est un principe constitutionnel. Si l’équilibre budgétaire de notre système de santé est gage de sa pérennité, celui de nos hôpitaux est la garantie d’investir et de se moderniser. Plus que de trouver des moyens supplémentaires, il est urgent de changer de paradigme pour redonner de l’élan et du dynamisme chez les acteurs et donc du sens. Revenir au principe d’équilibre budgétaire pour investir, développer des projets innovants et, in fine, pour se projeter dans l’avenir est donc nécessaire.
Les investissements, conditionnés par des marges financières, sont indispensables à l’entretien et à la rénovation des bâtiments, au renouvellement des équipements médicaux et hôteliers et à l’innovation. Ils contribuent non seulement à l’amélioration de la prise en charge des patients, mais également à l’amélioration des conditions de travail des personnels et à l’attractivité des établissements. Il faut, par ailleurs, veiller à ne pas oublier que l’hôpital n’est ni une entreprise ni une administration. Cependant, ce n’est pas parce que l’hôpital n’est pas une entreprise qu’il ne doit pas respecter des lois économiques, ce n’est pas parce qu’il n’est pas une administration qu’il doit faire fi de sa mission de service public par une vision comptable classique.
Finalement, le véritable débat consiste à déterminer la meilleure manière de mesurer la performance d’un hôpital, la qualité des soins, la pertinence des actes, l’évaluation des soins. Il faudra alors que les hospitaliers élaborent eux-mêmes des critères d’évaluation avant qu’un État ou qu’une personnalité extérieure ne vienne imposer ses propres critères. S’il est évident que l’hôpital ne se résume pas à un simple résultat comptable, il est aujourd’hui fondamental de changer de logiciel en considérant que l’équilibre budgétaire aussi contraignant soit-il fait partie des conditions d’un développement hospitalier de qualité.