Olivier Schmit
Secrétaire général du CSFM
En posant que la condition militaire recouvre « l’ensemble des obligations et des sujétions propres à l’état militaire, ainsi que les garanties et les compensations apportées par la Nation aux militaires », l’article L.4111-1 du Code de la défense exprime clairement que la Protection sociale des militaires relève de la condition militaire. C’est à partir de cette disposition juridique que le Conseil d’État, dans un avis rendu fin janvier 2020 sur le projet de loi instituant un système universel de retraite, a estimé que le principe du droit à pension des militaires présentait bien un caractère statutaire.
Cette compétence sociale, dont le droit à pension n’est qu’un aspect parmi d’autres, le Conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM) l’exerce depuis cinquante années via ses avis sur la condition militaire ou encore la participation de ses membres aux organismes à caractère social relevant du ministère des Armées.
Ce qu’y exprime le CSFM, ce sont les attentes de la communauté militaire de disposer d’une protection qui réponde à ses besoins. C’est également la nécessité d’adapter les dispositifs d’aides sociales aux évolutions de la société. C’est enfin la double préoccupation que la Protection sociale des militaires ne soit pas en retrait de la société et qu’elle conserve un caractère propre – singulier diraient certains – exigé par le statut militaire.
Plus que tout autre sujet, la situation des militaires blessés et l’accompagnement des familles affectées par la mort, la blessure, le handicap et plus généralement la maladie sont des questions qui intéressent la communauté militaire. Les instances de concertation le relèvent régulièrement. Assurer aux militaires blessés les meilleures conditions permettant de guérir, de se reconstruire et de reprendre une vie active est une préoccupation forte à laquelle le Haut Comité d’évaluation de la condition militaire a consacré son 13e rapport « La vie, la blessure, la mort ». Afin d’y répondre, le ministère des Armées a mis en place des moyens conséquents et une organisation complexe.
Pour l’accompagnement et la reconnaissance des blessés, les forces armées ont bien sûr le premier rôle. Elles s’appuient sur leurs ressources propres mais aussi sur divers organismes comme l’établissement des fonds de prévoyance militaire et de l’aéronautique chargés de collecter et gérer les cotisations des militaires et de verser des allocations en cas de blessure, d’infirmité ou de décès.
En matière de couverture santé, les militaires ont accès à un régime complémentaire qui s’est structuré selon des logiques d’armée à la sortie de la seconde guerre mondiale et qui est aujourd’hui en pleine mutation. Aujourd’hui, constatant que la part des militaires ne disposant pas de couverture complémentaire augmente, le Haut Comité d’évaluation de la condition militaire a proposé une prise en charge de la couverture santé complémentaire par l’employeur dans des conditions analogues à celles dont bénéficient les salariés du secteur privé. Le CSFM a repris cette proposition à son compte.
S’agissant enfin des aides sociales, le ministère cherche à limiter les conséquences des sujétions militaires (mobilité, absence, isolement) sur les familles. Ce soutien aux familles des militaires a fait l’objet d’une nouvelle impulsion avec la mise en œuvre d’un plan d’accompagnement des familles voulu par la ministre des Armées. Le CSFM, de son côté, appelle de ses vœux diverses mesures d’équité sociale comme la reconnaissance du PACS dans les mêmes conditions que le mariage ou encore la prise en compte des sujétions des militaires dans le soutien des familles concernées par des facteurs de fragilité comme le handicap d’un enfant.
Ainsi, à l’instar de bien des aspects de la condition militaire, la Protection sociale des militaires doit être en mesure de concilier plusieurs exigences : adhésion à un socle partagé par l’ensemble des citoyens et maintien d’un ensemble de règles et de moyens propres, justifiés par le statut et la condition militaires.