Tribune

Portrait de Hervé Chapron et Michel Monier, membres du CRAPS
En sortant du cadre devenu habituel, les accords collectifs de prévoyance peuvent être un champ nouveau, terreau de réinvention de la gestion paritaire.

Hervé CHAPRON & Michel MONIER
Membres du CRAPS, respectivement anciens Directeurs Généraux Adjoints de Pôle emploi et de l’Unédic et auteurs de «  Penser le social – 5 questions pour 2022  »

Episode 6 sur 8 de la série réalisée en partenariat avec le Centre technique des institutions de prévoyance (CTIP)

Le dialogue social, instrument central de la démocratie sociale, a été au niveau de l’entreprise redynamisé par les ordonnances de 2017. Dans le même temps les ANI à portée nationale sont trop souvent « cadrés » par l’exécutif.

Ce double mouvement, à front renversé, ne fait-il pas une place nouvelle aux accords de branche, aux accords professionnels ? Les Partenaires sociaux n’ont-ils pas l’opportunité de réinventer le dialogue social à travers les accords collectifs de branche pour in fine adapter le dispositif de protection sociale aux enjeux nouveaux ? La crise sanitaire a démontré, dans le domaine de la prévoyance, leur réactivité par la mobilisation des « fonds mutualisés ».

C’était là l’expression d’une anticipation que seules permettent la proximité des Partenaires sociaux avec « le terrain » et leur connaissancemétier des activités et des enjeux des branches. C’est ainsi que les accords de prévoyance sont bien plus que du salaire différé ou un avantage accessoire de la rémunération. Ils sont un levier de gestion et de défense du capital humain de l’entreprise. C’est pourquoi l’accord de branche apporte des réponses sectorielles appropriées à des sujets dont le dialogue social dans l’entreprise ne peut se saisir.

En sortant du cadre devenu habituel, les accords collectifs de prévoyance peuvent être un champ nouveau, terreau de réinvention de la gestion paritaire. Ce champ d’investigation illustrerait la responsabilité des Partenaires sociaux et des organisations à gestion paritaire dans l’adaptation d’un système de protection sociale au bénéfice autant des salariés qu’à leur famille, à l’entreprise qu’à ses actionnaires.

Quand, par facilité, les solutions de « grande Sécu » d’une part et de subvention du pouvoir d’achat par l’État d’autre part, viennent réduire la liberté conventionnelle, repenser la protection sociale et économique par le canal des branches, c’est rendre « principal » ce qui est aujourd’hui complémentaire.

Les gains économiques et sociaux d’une telle démarche, s’ils bénéficient à la branche impactent positivement les dépenses sociales de l’État : ce serait une des formes de l’implication de l’entreprise dans l’économie socialement responsable.