PR Eugénio Rosset
RESPONSABLE DE SERVICE
Depuis plusieurs années le « mal être » à l’hôpital s’aggrave inexorablement.
Fermeture de lits, non remplacement du personnel en maladie ou maternité, facturation T2A, lenteur administrative, souffrance du personnel… voilà autant de sujets parmi bien d’autres qui mériteraient des heures de réflexions et de débats.
Professeur agrégé en chirurgie vasculaire depuis 2003, Responsable du Service de Chirurgie Vasculaire au CHU de Clermont-Ferrand depuis 2015, très attaché à l’hôpital public, je me suis employé depuis de nombreuses années à faire bénéficier aux patients vasculaires des traitements les plus efficients et les moins agressifs apparus grâce aux progrès technologiques particulièrement notables en ce début de siècle dans ma spécialité (chirurgie mini-invasive, endoprothèses…).
Car c’est bien le rôle de l’hôpital public de développer et d’évaluer avec toute la prudence et le recul nécessaires les techniques nouvelles de soins.
Pourtant j’ai eu maintes fois la sensation de devoir affronter un véritable parcours du combattant administratif afin de pouvoir disposer d’une nouvelle technologie.
L’apparition des pôles en 2009 (loi HPST) n’y a rien changé.
Pourtant l’intention initiale lors de la création des pôles était louable : elle visait un fonctionnement rationnalisé grâce à un « triumvirat » associant Médecin, Cadre Soignant, Assistant de Gestion. La mission principale était le pilotage des activités et de fait l’optimisation de la gestion des coûts.
Francis Fellanger (conseiller général des établissements de santé à l’IGAS) écrivait d’ailleurs : « [les pôles] doivent favoriser les dynamiques de mutualisation et de coopération, l’ouverture au territoire, faciliter l’accès à l’innovation ».
Force est de constater dix ans plus tard que les pôles représentent pour beaucoup (dans un CHU de taille moyenne) un agrégat de services de soins de spécialité tellement différents les uns des autres que la mutualisation des moyens en reste limitée.
Les coopérations ont toujours existé entre les services et les spécialités : elles fonctionnent encore et toujours au gré des pathologies. Pour une spécialité aussi trans- versale que la chirurgie vasculaire les coopérations se font entre soignants de bonne volonté soucieux du bien fondé de leur pratique et cela quel que soit leur pôle de rattachement.
Les pôles, outils d’accès à l’innovation ?
L’hétérogénéité des spécialités agrégées en pôles n’apporte aucune aide évidente pour l’accès à l’innovation. Pire encore, que dire des dossiers novateurs montés à grands renforts de formulaires, passés par un premier filtre lié au pôle puis soutenus, pas forcément par un représentant de la spécialité, en CEB, en CIT, Comedins et autres commissions se réunissant tous les trois mois voire beaucoup moins souvent…
Ce ne sont que quelques exemples mais il est clair que le passage obligé par le pôle alourdit encore plus le parcours administratif déjà bien complexe.
Une piste de réforme pour l’hôpital public serait à mon sens de rendre un peu plus d’autonomie aux services en simplifiant les procédures et en rétablissant une forme d’autonomie dans le dialogue avec la direction et son pouvoir décisionnel.
Cette simplification est à mon sens un élément essentiel si l’on veut que l’hôpital reste attractif pour les jeunes praticiens, l’attractivité du Privé étant actuellement très forte non seulement sur le plan financier mais aussi sur le plan de l’accessibilité aux nouvelles technologies.